Interview : Yohan Salvador

Interview : Yohan Salvador

AEON FC | Première question pour ceux qui ne te connaissent pas : qui est Yohan Salvador, en quelques mots ?

Yohan Salvador | Je suis combattant professionnel de MMA depuis 2017. Avec deux associés, j’ai cofondé la Tactical Fight Team [à Toulouse, ndR]. Je pratique les arts martiaux depuis mon plus jeune âge. J’ai commencé le judo à 3 ans, puis j’ai pratiqué les arts martiaux vietnamiens pendant dix ans. Ensuite, je suis revenu au judo, puis à la boxe, avant de m’orienter vers le MMA et toutes ses disciplines associées. Je suis allé m’entraîner dans des clubs spécialisés : lutte, JJB, boxe anglaise, boxe thaï... Tout cela m’a construit en tant que combattant et coach.

Comment as-tu découvert le MMA et qu’est-ce qui t’a poussé à t’y consacrer plutôt qu’à d’autres sports de combat ?

Quand je faisais des arts martiaux traditionnels, il y avait deux volets : les katas et le combat. J’ai toujours été attiré par le combat. C’était ce que je préférais. Ces combats étaient déjà assez complets : percussions, projections, soumissions... Mon objectif était de combattre, notamment aux championnats du monde de cette discipline au Vietnam, mais je n’ai pas pu y aller pour des raisons financières. À ce moment-là, j’ai découvert l’UFC et des figures comme Lyoto Machida, issu du karaté. J’ai compris que si je voulais être fort, c’était le MMA qu’il fallait pratiquer. J’ai donc orienté toute ma vie autour de ce sport : j’ai repris le judo, fait de la boxe française avec mon oncle, et choisi une ville pour mes études en fonction de la possibilité d’intégrer un club de MMA. En 2012, j’ai rejoint l’Europe Top Team à Reims.

Tu es professionnel depuis 2017, donc tu as connu l’époque où le MMA n’était pas encore légal en France. Peux-tu nous parler de ces années plus "souterraines" ?

Oui, beaucoup pratiquaient, mais ce n’était pas officiellement reconnu. J’ai commencé en 2012 à l’Europe Top Team avec Anthony Dizy, Yacine Bandoui comme coach de pieds-poings, et d'autres. On s’entraînait dans un gymnase municipal, sans équipements spécifiques, sans chauffage l’hiver ni climatisation l’été. On installait et désinstallait les tapis à chaque séance. C’était vraiment l’époque pirate. Les deux premières années, je n’ai pas fait de combats en MMA, mes coachs voulaient que je développe ma lutte et mon grappling. J’ai ensuite commencé à combattre en Belgique : Charleroi, Bruxelles… En France, j’ai combattu en Pancrace et Grappling Fight. Trouver des combats était difficile, il fallait se déplacer à ses frais, sans soutien ni reconnaissance. Mais aujourd’hui, on s’entraîne dans une salle équipée, avec des partenaires compétents. À l’époque, il fallait aller faire du JJB, de la lutte ou de la boxe dans d'autres clubs, puis revenir au MMA pour assembler le puzzle.

Sur l’ensemble de ta carrière, quelle est ta plus grande fierté ?

Avoir fondé mon club avec Quentin et Axel. Aujourd’hui, notre club est reconnu au niveau national, voire international. On fait partie des meilleurs clubs français en résultats amateurs. On commence à former des professionnels qui se distinguent sur le circuit français. C’est vraiment ce dont je suis le plus fier.

À l’inverse, quelle a été ta plus grande difficulté en tant que combattant ?

Les blessures. Depuis mes débuts en 2012, j’ai eu plusieurs blessures, notamment aux épaules, qui m’ont écarté des tatamis pendant plusieurs mois. La plus récente, c’était en 2024, après mon combat contre Jimmy Vienot : cinq jours plus tard, j’ai été opéré de l’épaule. J’ai fait toute ma préparation blessé, mais je tenais à aller au bout. J’ai adapté ma stratégie pour ne pas trop solliciter mon épaule. J’ai perdu le combat, mais je ne regrette rien.

As-tu un surnom ? Si oui, quelle est son origine ?

Oui, mon surnom c’est Rocket. Il vient de mon préparateur physique, qui trouvait que je ressemblais au Rocket des Gardiens de la Galaxie — pas physiquement, mais pour le côté teigneux, prêt à tirer sur tout ce qui bouge. J’ai même fait des t-shirts avec une fusée pour un combat à Londres. Le personnage est stylé... même si c’est un raton laveur !

Peux-tu nous parler de ton parcours, de l’endroit où tu as grandi et de son influence sur ton évolution en tant que combattant ?

Je suis né à Montpellier et j’ai grandi à Gignac, un petit village devenu une ville de la périphérie. J’ai commencé les arts martiaux à cause de Dragon Ball Z — je voulais faire comme dans les mangas. Puis j’ai été inspiré par les films asiatiques, avec Jackie Chan, Bruce Lee… 

J’étais un élève moyen, mais j’ai toujours priorisé le sport. Pour mes études, je suis allé à Reims pour pouvoir m’entraîner en MMA. J’ai ensuite fait une école d’ingénieur, vécu dans plusieurs villes et même en Angleterre. J’ai pratiqué dans plein de clubs, plein de disciplines, et c’est ça qui m’a permis de devenir un combattant complet. Je n’ai pas de spécialité, je touche à tout. Je peux tenir tête à de bons grappleurs, boxeurs ou lutteurs. Je m’adapte en fonction du style dans lequel je vais combattre et de l’adversaire que j’affronte.

Le 25 octobre, tu combattras à l’AEON FC. Que représente cette organisation pour toi ?

C’est une belle opportunité, d’autant que c’est proche de chez moi. Ma famille pourra venir, ce qui n’était pas arrivé depuis mon combat au MMA Grand Prix de Bordeaux. En plus, j’affronte un adversaire solide, Helder Fernandes. On a combattu sur la même carte en 2021 : lui en main event, moi en co-main event, et on a remporté nos combats respectifs. Donc ça fait un moment que je le suis et que j’en entends parler.

Pour l’anecdote, il a aussi battu mon associé Quentin, qui disputait son premier combat pro, donc il y a une petite dimension de revanche.

Que veux-tu prouver ce jour-là, à toi-même et au public ?

Que je suis au niveau de mon adversaire. Helder a été champion de deux grandes organisations françaises. Je veux prouver que je peux l’égaler ou même le battre.

À trois mois du combat, dans quel état d’esprit es-tu ?

Je n’ai pas encore étudié ses combats, je me concentre sur moi. Je suis devenu père récemment, donc la fin d’année dernière a été compliquée : peu de sommeil, entraînements irréguliers. Aujourd’hui, mon fils dort mieux, je peux donc vraiment m’investir à fond, physiquement et techniquement. En septembre, je lancerai la préparation spécifique pour battre Helder Fernandes.

Si tu devais lui adresser un message, que lui dirais-tu ?

Prépare-toi bien, car moi je le ferai. C’est un honneur de t’affronter.

Comment décrirais-tu ton style de combat en trois mots ?

Complet, domination, mouvement.

Pourquoi avoir choisi “mouvement” ?

Parce que je bouge beaucoup. Depuis que j’ai pris un KO en 2021, je n’ai plus été vraiment touché. Mon style repose sur les déplacements : entrer, sortir, coller… Très peu de combattants savent gérer la distance comme moi. Ça me permet d’être en sécurité et d’éviter les échanges inutiles.

La dimension spectaculaire du MMA joue-t-elle un rôle dans ta préparation ? Cherches-tu aussi à impressionner le public ?

Je ne cherche pas à faire des coups spectaculaires juste pour le show. Mais je cherche à être efficace. Si je peux faire mal, je le ferai. Si je le projette, ce ne sera pas pour le poser gentiment. Et si je peux casser la cage comme Jordan Zébo, je le ferai.

Qu’est-ce qu’un “vrai combattant” selon toi ?

C’est quelqu’un qui organise sa vie autour de l’entraînement, qui a le courage de monter dans la cage, de se sacrifier pour offrir un spectacle au public. Mais c’est aussi quelqu’un de droit en dehors de la cage, avec des valeurs comme l’honneur et le respect.

Pour ceux qui ne te connaissent pas encore, quel message aimerais-tu leur faire passer avant ton combat ?

Regardez bien le combat, car vous ne saurez pas ce que je vais faire. Est-ce que je vais striker ? Lutter ? Amener au sol ? Je ne vais pas jouer la sécurité ou faire un combat fermé. Je vais chercher la domination, debout ou au sol, et je vais lui mettre la pression.

Dernière question : quel est ton objectif pour ce combat ? Vises-tu un KO, une soumission ?

J’aimerais bien le finir. Je ne suis pas du genre à mettre des KO nets, mais j’ai du punch. J’ai mis plusieurs knockdowns dans ma carrière. Donc si je le finis, ce sera probablement par soumission ou TKO. Et c’est exactement ce que je vais chercher.

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